Que pouvons-nous tirer de bon de la crise?

 

Que pouvons-nous tirer de bon de la crise?

Quels événements nous vivons! Quelle intensité! Bien entendu, ce n’est pas la première fois que notre monde est ébranlé. Les épisodes de peste, les guerres mondiales, la grippe espagnole ou les crashs boursiers ont aussi été des moments de déstabilisation profonde: des événements historiques terribles qui pénètrent très profondément notre âme et la conscience collective.

Dans ces moments-là, nous nous sentons très démunis et comme mis à nu. Ces ébranlements mondiaux agissent comme un révélateur pour les individus comme pour les collectivités. Au-delà du drame, ils nous permettent de nous voir tels que nous sommes, de dévoiler le meilleur comme le moins désirable en nous.

A l’heure du «retour à la normale», saisissons cette occasion de nous interroger et de prêter l’oreille à ce que Dieu fait au sein même du désastre que nous vivons.

C’est dans cet esprit que Dale Kauffman, fondateur des FJ, nous interpelle dans les entretiens vidéo (en anglais !) qu’il a menés ces dernières semaines. Il nous invite à profiter de ces temps d’ébranlement pour rechercher le cœur de Dieu et veiller avec lui, alors même que la souffrance/folie des hommes met le Seigneur à l’agonie.

La crise sanitaire que nous traversons a fait écho avec la demande insistante que Dieu nous a adressée en tant que ministère, à savoir de ralentir le rythme, de décélérer, de pédaler moins vite et de descendre de notre «petit vélo». Une parole difficile à mettre en œuvre, mais Dieu s’en est chargé. Depuis lors, plusieurs de nos activités-phare se sont arrêtées ou ont été reportées (groupes QL à Yverdon, Ecole de disciples, Comédie musicale, Formation au Travail parmi la Jeunesse, etc.).

Que signifie cette image du petit vélo ? Nous croyons qu’elle symbolise notre rythme de vie effréné, l’emprise du travail, mais aussi la force des habitudes : ces choses que nous faisons parce que nous sommes portés par le flot, mais qui apparaissent sous un autre jour lorsque nous prenons du recul, comme lors du confinement. Une course incessante qui nous prive de penser à l’essentiel et de développer notre intériorité, cet espace intérieur où Dieu parle. Notre temple intérieur est trop souvent envahi par des marchands certes légitimes, mais qui se révèlent de véritables voleurs lorsqu’ils nous privent de la prière et de l’écoute de Dieu.

Alors que nous avons, en partie, mis le pied à terre, nous nous rendons compte que le paysage s’est modifié, que quelque chose a changé dans l’air ambiant. Qu’est-il possible de percevoir alors que nous décélérons ? Une voix à peine perceptible, mais tenace, qui ne cesse de répéter que Dieu va encore une fois ébranler notre monde pour lui permettre de renoncer à ses sécurités, qui sont devenues autant d’idoles. Des paroles troublantes qui résonnent de façon particulière en cette période de pandémie.

Depuis Pâques 2016, au sein des FJ, nous parlons de crises à venir. Nous avions imaginé une crise économique, sociale, numérique (hacking de systèmes informatiques, comme dans le cas de la ville de Baltimore), énergétique ou encore environnementale, et même une combinaison de crises entre elles, mais nous n’avions jamais évoqué la possibilité d’une crise sanitaire !

Il est entendu que le coronavirus ne nous est pas envoyé par Dieu ! Il faut être clair. Ce n’est pas Dieu qui produit le mal qui nous touche aujourd’hui, mais il le permet (tout en lui donnant des limites!) pour nous aider à ouvrir les yeux sur notre situation, à nous «dévoiler» à nous-mêmes, comme nous le disions plus haut. Par ailleurs, les termes «exil» et «être dévoilé» sont un même mot en hébreux. Etre en exil, c’est être loin de ce qui est rassurant et familier. Ce n’est pas confortable et, à bien des égards, c’est angoissant. Cependant, c’est aussi l’occasion d’ouvrir les yeux sur des réalités qui jusque-là nous avaient échappé.

S’arrêter, ouvrir les yeux et veiller. Voilà les mots-clés, à mon sens, qui donnent sens à la crise qui nous touche. Tout un programme à mettre en œuvre, à «rendre réel» comme nous y invite l’Evangile lorsqu’il s’agit de «mettre en pratique» les paroles que Jésus nous adresse.

 

Et plus concrètement?

J’ajouterais encore un verbe à la liste ci-dessus : se préparer. Il est salutaire que chacun de nous s’interroge: qu’est-ce que Dieu me dit, à moi, dans cette crise? Et cette question vaut d’être posée aussi au niveau collectif: qu’est-ce que Dieu nous dit, en tant que Corps du Christ, au travers de cette crise?

De notre côté – et nous vous soumettons cette parole – nous croyons que nos concitoyens sont nombreux, aujourd’hui déjà, à se tourner vers Dieu, et qu’ils le seront encore bien plus à l’avenir. Ils viendront par milliers chercher la guérison de l’âme et du corps, et la Parole qui étanche toutes les soifs, comme ce jeune homme qui s’est présenté récemment à la porte de Morija en demandant à parler à un homme de Dieu. C’est la police qui l’avait envoyé à Morija: il était poursuivi par des puissances démoniaques et cherchait désespérément de l’aide… Il avait peur de devenir fou!

Là réside le premier défi que Dieu nous adresse : nous préparer à recevoir une vague d’hommes et de femmes (et d’enfants!) en recherche de Dieu. Comment leur offrir en suffisance des lieux de guérison et de formation de disciples? Sommes-nous prêts dans nos structures et nos agendas à répondre à cette demande croissante?

C’est dans ce sens que nous travaillons, en tant que JEM/FJ, depuis plus d’une décennie à Morija. Nous œuvrons pour rassembler une communauté bienveillante et formatrice, soutenue par des professionnels qui sauront soigner, accompagner, enseigner et orienter. Bien sûr, ce lieu à lui seul n’est pas suffisant! Il faudra créer partout des «espaces familiaux», des lieux petits et grands, dans des familles, dans des communautés de quartier, dans nos églises, pour permettre à tous ceux qui cherchent de trouver un lieu où l’Esprit de famille – le St-Esprit – est à l’œuvre.

Par ailleurs, nous sommes heureux de pouvoir vous annoncer que les travaux de rénovation sont terminés au deuxième étage de la maison que nous occupons à Morija (la plus ancienne de la propriété). Merci aux bénévoles et aux donateurs qui ont participé à cet effort, et particulièrement à Simi Waefler, qui a œuvré comme artisan et artiste à cet étage!

Maintenant, évoquons un second défi, plus écrasant encore que le premier (créer des «espaces familiaux»)! Notre monde est ébranlé, comme il l’a été de nombreuses fois depuis sa création. La chute de l’Empire romain au IVème siècle en est un exemple supplémentaire. C’est la structure administrative, économique et sociale du Vieux continent qui s’est effondrée à ce moment-là. Et précisément, ce sont les communautés monastiques qui ont tout à la fois sauvegardé et renouvelé l’héritage culturel et religieux de l’Europe.

Au-delà de l’ébranlement de nos sociétés, c’est un autre monde qui va émerger, comme le disait déjà Rick Joyner en 2000 dans son ouvrage «Vision Prophétique pour le XXIe siècle». La préparation de ce nouveau monde commence aujourd’hui, avec nos enfants. Comment pouvons-nous les orienter pour qu’ils entrent le plus vite et le mieux possible dans leur vocation (le «pour quoi» ils sont dans ce monde)? L’école est une première réponse: une école qui ouvre au monde et donne les clés du savoir tout autant que les moyens de grandir dans sa vocation. L’école Edenpark, dans laquelle Eve Crelier investit son temps et son énergie depuis cinq ans, participe à cette préparation de l’avenir. Nous sommes réjouis et encouragés du partenariat que nous développons avec cet établissement. Soutenons autant que possible ce type d’écoles aujourd’hui, pour qu’elles donnent toute leur mesure demain !

Pour terminer, il nous faut prendre conscience que tous ceux qui viendront à Christ dans les années à venir, par centaines de milliers, devront non seulement être restaurés, apprendre à connaître Jésus et à écouter Sa voix, mais également à obéir, c’est-à-dire à mettre en pratique dans ce monde l’appel de Dieu sur leur vie (une autre expression pour dire la vocation). Notre mission est de les orienter vers la restauration du monde, pour qu’ils contribuent à renouveler toutes les sphères de la société.

Alors oui, bien au-delà de la pandémie, et des difficultés économiques qu’elle engendre, levons les yeux vers le ciel, vers celui qui peut tout, même (et particulièrement) dans notre faiblesse. C’est là l’espérance chrétienne dans toute sa force: au cœur du désastre, s’attendre à l’intervention divine et se rendre disponibles pour qu’elle œuvre au travers de nous.

Que Dieu nous vienne en aide.

Didier Crelier

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